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Photo du rédacteurGermain Malette

LE NOHIC Autrefois [écrit 2013]

Dernière mise à jour : 21 nov. 2022

Tranche de vie

Berthe Prima, 78 ans, la fille du gardien du Nohic:

« Je suis retournée sur l’île du Nohic l’été dernier. Je n’y avais pas remis les pieds depuis

soixante-dix ans ! Pourtant ce n’est pas si loin… Mais c’est comme ça, la vie. Le temps a passé et, jamais, je n’ai eu l’occasion de remonter sur l’îlot. Plus je m’en rapprochais, plus les souvenirs émergeaient. Les larmes me sont venues.« Je suis arrivée sur la petite île en 1935. J’avais tout juste 3 ans. J’y ai vécu quatre ans. Avec mes parents, nous avions

déménagé de Nostang. Je n’avais jamais vu la mer. Mon père, Jean-Louis Le Guludec, travaillait dans une ferme. Il a accepté la proposition de Monsieur Jouanno de devenir le gardien de ses parcs à huîtres situés tout autour de l’île. Il y en a toujours d’ailleurs !« J’étais enfant unique.

De temps en temps mon père allait chercher une camarade sur le continent. Parfois c’est moi qu’il conduisait chez elle. Pour jouer. Mais je n’ai pas non plus le souvenir de m’être ennuyée seule sur le Nohic. Une fois, j’ai oublié ma seule poupée dehors. Il a plu des cordes. Ses yeux en pâte à papier étaient comme fondus.« Nous habitions dans la petite maison aujourd’hui en ruine. Une seule pièce, meublée d’une table et deux bancs, une armoire et deux lits de coin. Celui de mes parents à gauche, le mien à droite. Il y avait une échelle de meunier pour grimper au grenier où mon père entreposait des pommes de terre, des cageots, etc. Et il y avait cette cheminée dont j’ai retrouvé l’empreinte. Je me vois encore près du feu. Les boîtes de pâté Hénaff pour écoper « Je me souviens aussi des grandes marées. Quand la rivière montait très haut et inondait la maison ! Nous prenions les boîtes de pâté Hénaff vides – qu’on avait gardées de côté – pour vider l’eau dehors. Eh oui ! Nous n’avions ni eau courante ni électricité. L’eau de pluie était récupérée dans une cuve et nous nous éclairions avec des lampes à carbure.« Au début ma mère, Marie-Anne, travaillait dans une conserverie en face, au Magouër. Mais après l’explosion d’une chaudière elle ne voulait plus y aller. Elle est devenue journalière chez les maraîchers de Plouhinec. Mon père la conduisait dans sa petite embarcation, une plate de 2 mètres, qu’il manœuvrait à la godille ou à la rame.

« Il faisait tout avec sa barque : le plein de bois de chauffage, le plein d’alimentation, en plus des œufs de nos deux poules et de l’ail, des échalotes et des patates qu’il cultivait dans le lopin de terre, derrière la maison. Parfois, on traversait jusqu’à Étel. Pour y acheter des habits, par exemple. C’est là aussi, à la bijouterie, qu’on m’a acheté mes premières boucles d’oreilles.

Le Nohic…avant - Photo Fondation du Patrimoine.

Après la pittoresque et très photogénique maison de Saint-Cado, la ria d’Étel va s’offrir un nouveau paysage de carte postale avec l’île du Nohic. Un cliché qui deviendra réalité d’ici l’été 2016 avec la réhabilitation de la maison de gardien.

« C’était mon terrain de jeu : autour de la maison, les pieds dans l’eau, dans les rochers et les algues… ».

Berthe Prima, 83 ans, a été la dernière habitante de la maison du Nohic, sur l’île du Nohic (*), à l’entrée de la ria d’Étel.

La Plouhinécoise y a vécu quatre ans, de 1935 à 1939. « Mon père, Jean-Louis Le Guludec, était gardien du parc ostréicole. Il m’a appris à godiller. On allait faire nos courses au Magouër et on s’habillait à Étel, en face. Les pêcheurs de la rivière passaient souvent nous rendre visite le soir : on leur offrait du flip, du cidre et de l’eau-de-vie qu’on faisait flamber. On a quitté Le Nohic quand j’ai eu sept ans. Je devais aller à l’école… ».


125.000 EUR de travaux

Berthe replonge, nostalgique, dans ses souvenirs d’enfance. « On vivait à trois dans la seule pièce (deux bancs, une table, deux lits et une armoire) qui faisait office de salle à manger, de cuisine et de chambre. Je me souviens que pendant les grandes marées, on écopait avec des boîtes de conserve ».

L’octogénaire est aujourd’hui membre d’honneur de l’association « L’île du Nohic », créée en 2013 dans l’unique but de restaurer l’îlot et sa maison (le dernier gardien a quitté les lieux en 1955).

Un projet qui se concrétise enfin. Son président, Jean-Marc Beauchet, amoureux de sa ria, a vécu 25 ans dans une chaumière avec vue sur l’île du Nohic et la maison qui se dégradait au fil du temps. « Il fallait faire quelque chose ». Le Conservatoire du littoral, propriétaire du lieu, a confié depuis hier la délégation de maître d’ouvrage à Plouhinec, chargée du chantier de réhabilitation.

125.000 EUR de travaux, financés à hauteur de 102.500 EUR par des mécènes, le Conservatoire du littoral et les nombreuses actions de l’association. La maison de 1893, ses murs, sa charpente (un toit à quatre pans) et ses ouvertures seront restaurés à l’identique. Copie conforme de sa grande soeur de Saint-Cado. « Ce sera une opération blanche pour la commune », insiste Adrien Le Formal, maire de Plouhinec. Hier a aussi été lancée la souscription publique avec appel aux dons. « Tous les gens de la ria sont souscripteurs parce qu’ils savent que ça représente une vraie plus-value patrimoniale. C’est un projet qui a une âme, du sens ». Pas étonnant que l’association compte 230 adhérents.

Pas vocation à accueillir le public

Le permis de construire sera demandé en septembre. Début du chantier en janvier. « Le site a déjà été nettoyé et on a récupéré plein de vieilles pierres ». Avant l’été 2016, l’île du Nohic pourra ainsi rivaliser avec sa voisine de Saint-Cado, sur l’île de Nichtarguer. Mais attention, comme la pittoresque et très photogénique maison aux volets bleus à Belz, l’île du Nohic n’a pas vocation à accueillir le public qui pourra juste profiter du paysage de loin, en bateau ou en kayak.

Une fois l’île restaurée, l’association compte se trouver d’autres occupations : à commencer par les cabanes de l’île Maniavec. Un autre petit bijou de la ria à réhabiliter, îlot rocheux de 400 m², à mi-chemin entre Plouhinec et Etel, sur la rive droite de la ria.

PEC NOHIC PRIMA MAIRE.jpg

Madame PRIMA avec – au centre – Adrien LE FORMAL, Maire., Jean Marc Beauchet et Rémi Nicolas.

Témoignage de Jacky GUILLEVIC. [Etel]

« Avant cela, ma grand-mère paternelle y a habité. Son père Julien Marie LE LAMER était le gardien du parc à huîtres.

Ma grand-mère est née en 1901. Petite, le matin elle allait à l’école à Belz. Son père la débarquait côté Plouhinec et elle allait à pied à l’école. Le soir, elle attendait sur la grève (parfois plusieurs heures) que son père vienne la chercher après son travail.

Pour l’anecdote, le maître d’école était un prêtre et les cours étaient donnés en breton (eh oui). Puis, plus tard, à 14 ans, elle est rentrée chez Mr Duval au 4 de la rue de la Libération comme « bonne ». La famille a du quitter l’île après le décès de son père, mort de la grippe espagnole en 1918.

Cela a dû être un gros changement pour elle, de passer d’une maison d’une seule pièce sans eau ni électricité placée au milieu de la rivière à une maison avec toutes les commodités au centre d’Etel. »


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